Il était près de 16H00 et il faisait encore une fois une chaleur étouffante. Le mois de septembre s’annonçait à merveille ! Les cours avaient repris, Cassandra n’arrêtait pas de travailler. Elle donnait le meilleur d’elle-même. Mais aujourd’hui, elle avait terminé tous ses projets et connaissait tous ses cours sur les doigts de la main ! Les seules personnes avec qui elle était vraiment proche étaient sa sœur et sa colocataire…
Or elle n’avait pas envie d’aller voir sa sœur aujourd’hui. Elles étaient très proches mais ce n’était pas une raison pour l’étouffer non plus ! Elles se croisaient régulièrement sur le campus, ce qui était une bonne chose. Mais Katharina avait sa propre vie et Cassandra ne s’était pas inscrite à la CNU pour jouer le rôle de la petite sœur collante.
En ce qui concernait sa colocataire, elle avait des projets pour la journée. Pas question non plus de s’immiscer dans ceux-ci.

C’est comme ça que Cassandra sortit de son appartement, son sac à main sur l’épaule, se demandant ce qu’elle pourrait bien faire de sa fin d’après-midi. Elle avait grand envie de se détendre et en avait bien besoin ! Ses cours étaient géniaux mais l’université ne comptait pas que le côté travail. Il y avait cet autre aspect que Cassandra ne connaissait pas trop bien : celui des relations humaines. Elle n’était franchement pas très douée pour se faire des amis et c’est pourquoi elle appréciait particulièrement les activités en solitaire.

Son défi de la journée sera de parler à une personne inconnue. Oui, c’était un excellent projet ! Rien de tel que de se vider la tête !
Pour son entrée à l’université, Cassandra avait pris des brochures de tout et n’importe quoi afin de se familiariser avec l’endroit où elle allait passer ses prochaines années… C’est comme ça qu’elle eut l’idée de passer à ce fameux « Christopher’s coffee ». Selon ce papier, c’était un excellent lieu pour se réunir entre amis…

Cassandra passa la porte et remarqua que beaucoup de tables étaient occupées. Quoi de plus normal ? Il était 16H00, heure à laquelle le soleil tapait le plus. Tous les jeunes avaient eu l’idée de prendre un rafraîchissement !
La jeune femme faillit faire demi-tour mais se ravisa. Il fallait bien qu’elle affronte la société et qu’elle s’y fonde. Quelques têtes s’étaient tournées vers elle lorsqu’elle franchit la porte. Cassandra sentit ses joues s’empourprer et remit anxieusement une mèche de ses cheveux derrière ses oreilles tout en marchant jusqu’à un endroit où le café semblait plus désert.

Quelques groupes de personnes discutaient bruyamment autour d’elle, ne lui jetant pas un seul regard. Tant mieux, elle passait inaperçue. Autrement, elle se serait encore une fois sentie gênée d’être au centre de l’attention générale.
Son regard se dirigea sur un jeune homme brun, assis seul à une table. C’était la circonstance idéale pour faire une nouvelle connaissance : quelqu’un de solitaire, tout comme elle ! Cassandra fit quelques pas en direction de l’étudiant et se répéta mentalement qu’il était tout à fait possible qu’elle puisse l’accoster sans passer pour une idiote. Habituellement, les garçons l’accostaient, pas le contraire ! Et bien souvent, il ne s’agissait que d’imbéciles…

Cassandra était à présent à côté du jeune homme et fit un bruit qui s’approchait du raclement de gorge afin d’avoir son attention avant de dire, tant bien que mal :

« Excuse-moi de te déranger… Je me demandais s’il était possible qu’on partage cette table ? Je suis… hum… seule et tu sembles l’être aussi… »

Cassandra était loin d’être douée pour se faire des amis. Mais elle fut rassurée en entendant que son interlocuteur n’était pas très dégourdi, tout comme elle.
Elle lâcha un franc sourire en entendant son ton hésitant, ce même ton qu’elle avait quelques secondes plus tôt. La jeune femme était chanceuse : elle n’était pas tombée sur un goujat ou un de ces types bien trop sûrs d’eux. Lui n’était pas à l’aise, tout comme Cassandra l’était. Déjà, ils avaient un point commun !

Cassandra remit une mèche de ses cheveux derrière son oreille –malgré le fait que cette mèche était déjà parfaitement à sa place ! Elle était plantée debout à côté de ce jeune homme brun qui l’invitait à s’asseoir à côté de lui.
Il n’avait pas refusé donc il n’attendait personne. Ou alors il attendait quelqu’un et allait changer de table ou lui demander de partir dans quelques minutes. Oui, ce devait être ça : quelqu’un allait bientôt arriver et Cassandra devra bouger de là. Si cette hypothèse se révélait vraie, ce n’était pas un problème. Elle avait adressé la parole à un étranger, c’était déjà un grand pas.

Cassandra se rendit compte que ses jambes étaient prises de tremblements. Il ne manquait plus que cela ! Accoster quelqu’un qu’elle ne connaissait ni d’Eve ni d’Adam la stressait tellement qu’elle tremblait des jambes. Avant que le jeune homme ne s’en rende compte, elle s’assit en face du jeune brun. Peut-être l’avait-il remarqué finalement. En songeant à cette éventualité, Cassandra rougit.

Décidemment, elle allait passer pour une cruche ! C’était bel et bien ce qu’elle était pourtant, mais elle aurait voulu faire meilleure impression. Voilà qu’il demandait si elle voulait boire quelque chose…

« Oui-oui » s’empressa-t-elle de dire. En réalité, elle ne voulait rien boire de spécial mais pour quoi serait-elle passée à dire non alors qu’elle venait d’entrer dans un café ? Après quelques secondes de réflexion, elle indiqua au serveur qu’Alex venait d’appeler « une limonade s’il vous plait. »

Voilà qui était fait. La commande était passée et le brun s’occupait d’engager la conversation. Cela arrangeait bien Cassandra de ne pas avoir à réfléchir à d’éventuels sujets de conversation.

« Je m’appelle Cassandra et toi ? »

A la question de s’ils partageaient un cours ensemble, Cassandra ne sut quoi répondre. Pendant ses cours, elle ne regardait jamais quels étaient les élèves qui l’entouraient. Peut-être était-il en cours avec elle… Mais elle n’en savait rien. Elle était bien trop concentrée à suivre le cours ; elle ne lâchait des yeux le professeur que pour gratter sur sa copie. Généralement, elle arrivait dans les premières et se mettaient dans les premiers rangs ; mais pas tout devant non plus pour ne pas attirer l’attention de tous ! Parfois elle avait des voisins, parfois non. En tous cas, c’était bien rare que quelqu’un lui adresse la parole.

« Peut-être oui ! » Elle passa sa main dans ses cheveux puis avoua « Je suis beaucoup de cours donc il y a des chances qu’on ait au moins un cours de commun… »

Dans un élan de fierté, elle ajouta : « Je suis en première année de droit et toi ? »

Ainsi le jeune homme qu’elle avait en face d’elle se prénommait Alex. C’était rassurant de mettre un nom sur un visage. Déjà, Cassandra se sentit plus en confiance. Pourtant, dire son prénom n’engageait en rien… C’était simplement psychologique.
Cet Alex suivait l’histoire et la littérature. Très intéressant. Cassandra avait déjà assisté à un cours de littérature par envie. Elle n’est inscrite que dans le département de droit officiellement mais il lui arrivait de vouloir assister à d’autres cours en toute illégalité. Personne ne vérifiait qu’elle n’avait normalement pas le droit d’assister à tel ou tel cours mais elle ne pouvait s’empêcher de vouloir augmenter sa culture générale.

Lorsqu’Alex évoqua qu’il était joueur dans l’équipe de football, Cassandra ne put s’empêcher d’hausser un sourcil. Dès qu’elle s’en rendit compte, elle le baissa et sourit. C’était très mal élevé de sa part d’avoir haussé un sourcil, c’est pourquoi elle regretta aussitôt son geste.
De toute façon, tous les hommes s’évertuaient à faire du sport. C’était leur nature. Cassandra, elle, n’était pas réellement sportive et ne pouvait donc pas partager la passion qu’avait Alex. En fait, si, elle aimait un sport : la course à pied. Cassandra adorait courir pour se défouler. Tous les matins, elle profitait que tout le campus dorme encore pour courir une heure ou deux comme une délurée. C’était une manière pour elle de se défouler, elle qui était d’une timidité excessive.
Mais elle n’avait parlé à personne le besoin qu’elle avait de courir. Son père et sa sœur savaient qu’elle courait de temps à autre mais ils ne savaient pas à quel point il était important pour elle de faire cette routine quotidienne.

Néanmoins, faire partie d’une équipe de football, très peu pour Cassandra. Mais après tout, peut-être aimait-il le football autant qu’elle aimait la course à pied ?

« Enchantée Alex. J’espère que tu réussiras dans l’histoire, la littérature et… le football » pour le dernier, Cassandra parla d’une voix moins assurée. Peut-on réellement souhaiter de la réussite dans le domaine du football ? Cassandra n’y connaissait rien. Peut-être Alex allait-il se vexer devant l’ignorance à ce sujet de la part de la jeune femme ?

La jeune femme était tellement absorbée par la question du football qu’elle ne remarqua même pas le geste d’Alex à l’encontre du serveur. Si elle l’avait vu, elle aurait très certainement protesté pour payer sa limonade mais elle n’en eut pas l’occasion.
A la question d’Alex, Cassandra sourit. Pour elle, le choix de la CNU était simple à prendre !

« Ma sœur est ici à la CNU, elle s’appelle Katharina, tu l’as peut-être déjà rencontrée…. »
Cassandra jugea bon de rajouter un petit « Elle me ressemble… » avant de se rendre compte qu’il était idiot de préciser une telle banalité. Elles étaient sœurs, quoi de plus logique qu’elles se ressemblent !

« On est plutôt proches et j’ai voulu la rejoindre. Je viens du Texas » précisa-t-elle pour justifier le fait que sa sœur lui manquait. Oui, le Texas n’était pas la porte à côté !

Cassandra rigola nerveusement. Que c’était ridicule de venir à la CNU pour rejoindre sa sœur ! Elle aurait pu choisir une autre université plus prestigieuse mais non… Elle avait choisi la facilité en suivant sa grande sœur. Et voilà qu’elle déballait ça à un parfait inconnu prénommé Alex et qui jouait au football.

Pour détourner la conversation, elle demanda un bref « Et toi ? » afin de savoir quelles étaient ses motivations à lui. Certainement de meilleures motivations que la jeune femme !
Cassandra remit une mèche de cheveux à sa place, sourit et but une gorgée de limonade, écoutant son interlocuteur.